2009-08-02

A3. CREMATION à PASHUPATINATH (2.8.2009).





CREMATION à PASHUPATINATH




Comment faire disparaître les corps ?
A Pashupatinath, telle est la question cruciale.
Partout sur cette planete, cette question exige des réponses concrêtes.


En Occident, nous enterrons souvent les cadavres.
Les vers travaillent lentement et en silence.
Discrétion assurée - d'où la paix des cimetières.
Les crématoriums se multiplient, mais leurs cérémonies funéraires sont peu spectaculaires.


A Pashupatinath, les bûchers funéraires sont publics.
On pense aux peines capitales de l'Europe médiévale, quand les sorcières, Juifs et hérétiques, avaient - aux moments de crises sociales - le privilège d'être brûlés vifs en public.
Comment se débarrasser des cadavres ?
A défaut de les enterrer, on peut les brûler.
L'air en garde constamment une odeur caractéristique...


Pour alimenter les bûchers, il faut d'énormes quantités de bois.
Des véhicules déposent sur les berges des fagots de bois.
Une sangle tendue sur leur front, tel le joug frontal des boeufs, des femmes portent sur leur dos ces volumineux fagots jusqu'au plus près des bûchers.
La logistique est prête à résoudre la question des corps.


Comme à Bénarès, il est recommandé de mourir à Pashupatinath.
La famille porte le cadavre sur un brancard en contrebas du Temple d'or.
Les préparatifs commencent.
J'y assiste depuis l'autre rive, côté oriental.
On dépose le brancard à un emplacement spécial des ghats, perpendiculaire à la pente, près de la Bagmati.
Le mort, habillé, est entouré d'un linceul blanc.



On dépouille le cadavre de ses vêtements.
On le recouvre d'un linge orange, couvert d'inscriptions.
On descend le brancard jusqu'à l'eau, le cadavre est aspergé, puis on le repose à sa place initiale.
Ses proches offrent, chacun à leur tour, une guirlande de fleurs, de la poudre rouge, se recueillent.
Ensuite le brancard est transporté vers l'aval, ou plusieurs autels de pierre sont prévus.



Sur l'autel se dresse un bûcher.
Les porteurs y déposent le mort, que l'on arrange au mieux.
Un spécialiste allume le feu.
La crémation commence, veillée par deux personnes (sans compter la famille), qui activent le feu avec une perche.


Plusieurs bûchers brûlent en même temps, dégagent une fumée épaisse, qui fait fuir à plusieurs mètres.
Les odeurs suffoquent, collent à la peau et aux bronches.
Beaucoup plus tard, quand la famille pleure l'incinéré ou se dispute ses biens, les cendres sont jetées dans la rivière vers l'aval.
Le feu et l'eau, éléments de Shiva, permettent de faire disparaître les corps.


Lionel Bonhouvrier.